Allo docteur ?

Arsenal, orphelin de son buteur providentiel, Robin van Persie, a encore montré ses limites face à Manchester United ce weekend. Serait-ce là le vrai Arsenal ou celui que l’on a pu apercevoir lors des matches de Liverpool, Southampton et Manchester City ? Telle est la question. Mais de quel mal souffre Arsenal ? La réponse peut paraitre simple à première vue mais elle est bien plus complexe que cela en réalité.

“Vous ne pouvez pas vendre chaque année vos meilleurs joueurs et espérer vous améliorer.”

Comme on a pu le constater sur les derniers matches, Arsenal n’arrive pas à développer son jeu. Certains joueurs ne jouent pas à leur niveau réel de performance (Vermaelen, Podolski, Giroud, Cazorla), d’autres ne jouent pas à leur poste de prédilection (Ramsey, Walcott), ou sont en phase de négociations de contrat (Walcott), et enfin d’autres sont blessés (Gervinho, Diaby, Rosicky, Szczesny, Gibbs). Donc autant de handicaps pour un Arsenal en perte de compétitivité depuis quelques années et qui vend ses meilleurs joueurs chaque été. “Vous ne pouvez pas vendre chaque année vos meilleurs joueurs et espérer vous améliorer.” Ces mots d’Alan Shearer reflète la réalité d’Arsenal et l’aveuglement irrationnel d’un board vieillissant. Vendre coup sur coup Cesc Fabregas, Samir Nasri, Alex Song et Robin van Persie est de l’inconscience sportive. Puis, remplacer ces joueurs n’est pas chose aisée. Les remplacer par des joueurs d’un calibre inférieur, réclamant un salaire moins conséquent, ne peut résoudre ces problèmes. L’instabilité de l’effectif d’Arsenal est l’une des causes du mal d’Arsenal. Chaque saison, Arsène Wenger doit obtenir des résultats avec une équipe nouvelle, des joueurs qui ne se connaissent pas, qui n’ont aucun automatisme. Ces choses ne s’acquièrent qu’avec le temps, or, compte tenu des impératifs économiques et sportifs immédiat, la tâche d’Arsène Wenger n’en est que plus difficile.

Trop de libertés tue la liberté

Mais là où l’équipe d’Arsenal est aussi faible, c’est tactiquement et c’est là où réside l’erreur principale d’Arsène Wenger. Tactiquement, l’équipe d’Arsenal est une catastrophe. La liberté laissée aux attaquants ne convient pas. Les joueurs semblent perdu dans ce schéma de jeu. Les mouvements sont mauvais et prévisible. Wenger ne s’adapte jamais à son adversaire et quel que soit celui-ci, il s’obstine à imposer son style de jeu. Une grossière erreur, selon moi, compte tenu de la qualité en baisse de ses joueurs. L’exemple type est Sir Alex Ferguson qui adapte son système selon les indisponibilités dans son équipe. Pour le match d’Arsenal, il a compris que Mikel Arteta est le pilier central de l’équipe et que si celui ci ne rayonne pas, c’est l’équipe toute entière qui ne rayonne pas. Il a donc donné des consignes à Wayne Rooney pour presser la première rampe de lancement du milieu d’Arsenal. Ajouté à cela un pressing constant et collectif des Red Devils, Arsenal n’a pu exister face à Manchester United. Le duel tactique entre Ferguson et Wenger a été remporté haut la main par l’Ecossais. Une nouvelle fois.

L’absence de remise en cause d’Arsène Wenger est inquiétante pour l’avenir d’Arsenal. Sa philosophie de jeu est respectable mais quand on est un grand entraineur, on se doit de se remettre en cause. Surtout après sept années sans trophées. Cette absence de réaction soulève de lourdes questions. La première, aussi difficile soit-elle, est ce qu’Arsène Wenger est toujours l’homme de la situation à Arsenal ? La faiblesse tactique d’Arsenal depuis des années et son absence de remise en cause amène à cette conclusion. Ne faudrait-il pas du changement au poste d’entraineur pour redynamiser un groupe démoralisé par les départs ? L’arrivée de Steve Bould a eu un effet positif sur la défense d’Arsenal. Donc, pourquoi pas apporter du sang neuf au club ? Cependant, je crois toujours qu’Arsène Wenger reste l’homme de la situation à Arsenal et je crois que le coeur du problème ne se situe pas au niveau de l’entraineur mais au plus haut niveau du club.

Un mal-être à tout les niveaux du club

La deuxième question que soulève cette absence de réaction, et pour moi la plus grave, est, existe t-il un conflit entre Arsène Wenger et ses dirigeants ? Lors de l’Assemblée Générale Annuelle des actionnaires, on a pu voir Ivan Gazidis dire que l’intégralité des fonds du club sont redirigés pour l’équipe et son manager. Mais plus tard, en réponse à une question d’un actionnaire portant sur l’utilisation du budget des transferts, Arsène Wenger a répondu qu’il faisait avec les moyens que le board lui accordait. A demi-mot, le manager français vient contredire son directeur exécutif sous entendant qu’il faisait ce qu’il pouvait avec l’argent que le conseil d’administration lui accorde. Quand ce fut à Peter Hill-Wood de répondre à une question concernant la vente de Robin van Persie et de voir le président d’Arsenal répondre qu’il a été vendu “pour des raisons sportives“, on peut douter de la sincérité de l’homme et que cet épisode soit source de conflits, tant Wenger souhaitait conserver son buteur.

Quand on entend ces mêmes membres du board affirmé que Wenger a carte blanche et qu’il peut utiliser le budget comme il le souhaite, et le principal intéressé dire qu’il peut dépenser 40 millions d’euros sur le bon joueur et ne pas le faire, cela soulève aussi des questions. Arsène Wenger est-il réellement maitre à bord en matière de transfert ? La réponse est non. Alors oui, le manager d’Arsenal peut mettre 40 millions sur la table pour un joueur mais c’est sur la question du salaire que cela se complique. Pour exemple, il est de notoriété publique que Wenger adore Eden Hazard et que Hazard souhaitait venir à Arsenal. Mais cela ne s’est pas fait. Pourquoi ? Arsenal avait les fonds pour payer son transfert, mais le salaire réclamé par le joueur et son agent a refroidit les velléités du board. Avant ça, il s’est passé a peu près la même chose avec Juan Mata. Le board considérait que le recrutement de ce joueur était un risque (notamment financier) donc ils ont mis fin aux négociations. Le problème salarial est chronique à Arsenal. Des joueurs jouant en réserve ou tout simplement restant en tribune, sont payé des fortunes alors que des joueurs titulaires sont moins bien payé que ces “lofteurs”. Il y a aussi le problème des prolongations de contrat que le board refuse d’aborder avant la dernière année du joueur et qui amène à des situations aberrantes comme celle de Robin van Persie et Theo Walcott, qui sont en position de force et qu’on a ou qu’on va devoir vendre pour ne pas le voir partir gratuitement au mercato d’été suivant.

C’est pour toutes ces raisons, pour la plupart plus politique que sportive, que je crois que l’absence de réaction de Wenger est une forme de rébellion afin de faire prendre conscience à ce conseil d’administration la faiblesse du modèle, du manque d’ambition et de leur faire comprendre son mécontentement. Je crois Arsène Wenger suffisamment intelligent pour voir que les choses ne vont pas bien dans son équipe. La vénalité du board est un poison qui a infiltré le club à tout les niveaux. De Stan Kroenke totalement désintéressé du club, à Peter Hill-Wood infect envers les supporters du club, à Arsène Wenger fatigué de devoir se battre et voir chaque année les implications politiques et économiques prendre le pas sur le sportif, et enfin les joueurs désabusés de voir tout les grands joueurs s’en aller chaque saison. Arsenal souffre d’un mal profond, difficile à soigner et qui se répand dans toutes les arcanes du club comme l’odeur putride d’un cadavre en décomposition. Le seul remède serait une purge au plus haut niveau du club afin d’assainir l’atmosphère et redonner des couleurs aux ambitions du club.

#Yann


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