Evolution tactique d’Arsenal depuis 20 ans (1992-2012)

Le “Boring Arsenal”

Après la fin de saison la plus haletante de la Premier League en 1989, où Arsenal est allé remporter le championnat dans le temps additionnel du dernier match à Liverpool, permettant aux Gunners d’apporter un nouveau trophée après une saison incroyable. En effet, elle fut la consécration du “Famous Four” d’Arsenal, composé de Tony Adams, Steve Bould, Nigel Winterburn et Lee Dixon, qui n’encaissa que 18 buts sur l’ensemble du championnat et en gardant les cages de David Seaman inviolée 24 fois. Un record ! Puis un autre titre en 1991, leur apporta toute la gloire qu’ils méritaient. Mais la saison 1992-1993 marque un tournant dans le jeu d’Arsenal. Ce fut le début du “boring Arsenal”. Georges Graham réorganisa toute son équipe afin d’en faire une forteresse imprenable. Sur les cinq saison précédentes, Arsenal marquait en moyenne 66 buts par saison. Cette moyenne tomba à 40 en 1992-1993.

Pour remédier à la très décevante saison 1991-1992, où Arsenal termina à une très décevante 10ème place, Graham s’appuya donc sur ce qui faisait la renommée d’Arsenal à l’époque, sa défense. En accentuant le côté défensif de son équipe, il a totalement mis de côté le côté créatif de son équipe et l’attaque. L’équipe, qui jouait principalement en contre, fut donc devenue dépendante des exploits de ses attaquants, Alan Smith et surtout Ian Wright. En championnat, cette tactique n’a pas réellement eu l’effet escompté, mais ce fut en FA Cup et en League Cup qu’Arsenal se distingua en remportant les deux coupes et la Coupe des vainqueurs de Coupes en 1994.

Cette époque fut aussi marqué par les écarts de conduites de certains joueurs, et surtout Tony Adams. A l’époque, le capitaine des Gunners  avait de gros problèmes d’addiction à l’alcool, à tel point, qu’il avouera dans sa biographie, avoir joué un match en état d’ébriété, s’être battu avec Ray Parlour ou Martin Keown. Il fit même 2 mois de prison pour avoir écraser sa voiture contre un mur en état d’ébriété.  En plus de ces écarts de conduite, l’entraineur Georges Graham fut mêlé à une histoire de pots de vins pour la signature de certains joueurs. Il démissionna en 1995 et fut suspendu pendant 1 an par la fédération anglaise.

La révolution Wenger

L’arrivée, en 1996, d’Arsène Wenger, jusqu’alors quasi inconnu, marque le début de la révolution à Arsenal. Il n’a pas seulement révolutionné le jeu pratiqué, mais tout ce qui entoure l’équipe, les entrainements, la préparation, la diététique, etc… En quelques mois, il a transformé le “boring Arsenal” en une machine bien huilée pratiquant un football jamais vu en Angleterre jusque là. A son actif, il a le mérite d’avoir remis sur de bons rails Tony Adams, empêtré dans son addiction à l’alcool, en le faisant suivre un régime alimentaire particulier. Grâce à l’hégémonie de son équipe sur le football anglais au début des années 2000, il a été l’un des principaux acteurs du changement de philosophie dans le football anglais.

La philosophie d’Arsène Wenger a atteint son apogée en 2004, quand son équipe a réussi à rester invaincue pendant toute la saison en championnat, tout en pratiquant un jeu flamboyant. La tactique que Wenger a mise en place est un jeu basé sur le mouvement. Dès qu’un joueur récupère le ballon, ses coéquipiers se déplacent de manière à offrir au porteur du ballon, une, deux voire trois possibilité de passe. Au centre de ce dispositif se trouvait Dennis Bergkamp dans un rôle de meneur de jeu/second attaquant qui lui laissait suffisamment de libertés pour bonifier le jeu de l’équipe. Dans son système, les latéraux et les milieux excentrés ont un rôle très important. Les joueurs comme Pires et Ljungberg étaient là pour étirer les défenses et créer des brèches pour que le duo Bergkamp/Henry fasse la différence. Plus qu’à n’importe quels autres joueurs, ce système demande énormément aux latéraux puisqu’en plus de leur travail défensif, ils doivent apporter un soutien offensif afin de créer le surnombre.  Derrière le duo magique Bergkamp/Henry, on retrouvait deux rocs, Gilberto et Patrick Vieira placés en milieux défensifs relayeurs pour récupérer le ballon le plus tôt possible et asphyxier l’adversaire. Au final, Arsène Wenger avait créé une équipe pour magnifier et protéger son duo Henry/Bergkamp.

Equipe type des Invincibles de 2004.

“One man, one team”

La saison 2011-2012 marque un tournant à Arsenal. Cesc Fabregas, Samir Nasri et Gaël Clichy sont parti. Le début de saison est catastrophique. Arsenal encaisse une gifle historique à Old Trafford (8-2) et se retrouve presque en perdition en championnat. La saison passée Arsenal est passé par tout les états, capable du meilleur comme du pire. Mais surtout, l’équipe d’Arsène Wenger est devenue dépendante de la forme d’un seul joueur : Robin van Persie.

La philosophie et le système de Wenger n’évoluent pas d’un pouce mais avec la prédominance d’un joueur au top de sa forme, la tactique a surtout eu pour but de faire briller Robin van Persie. Pour preuve, le second meilleur buteur d’Arsenal était Theo Walcott avec seulement 8 buts, alors que Robin van Persie caracolait en tête avec 37 réalisations. Le néerlandais aspirait la majorité des occasions, les joueurs s’appuyaient sur lui sans compter, oubliant presque l’essence du jeu d’Arsenal : le mouvement. Au milieu, la nouvelle recrue d’Arsenal, Mikel Arteta, venue pour combler le départ de Cesc Fabregas, est devenue en l’espace de quelques semaines le patron de l’entrejeu, aux côtés d’Alex Song et de Tomas Rosicky. Pour preuve, en son absence, Arsenal n’a remporté qu’un seul match. Avec le recul, on pourrait estimer qu’Arsenal n’était pas dépendant de Robin van Persie, mais de Mikel Arteta, tant sa vision de jeu, son expérience et son intelligence ont été des armes essentielles pour Arsenal la saison passée. Défensivement, c’est là qu’Arsenal a le plus pêché, en montrant des écarts parfois indigne d’un club de son standing. Bien que Laurent Koscielny ait confirmé tout le bien que l’on pensait de lui après sa première saison, son partenaire au début de saison, Per Mertesacker, a eu beaucoup de mal à s’habituer à la Premier League. En cours de saison, le retour de Thomas Vermaelen a grandement aidé Arsenal, qui a vu une paire défensive de grande qualité émergée.

Le principal problème d’Arsenal la saison dernière a donc été l’absence de collectif. Au lieu de jouer pour les autres, Arsenal jouait pour Robin van Persie, ce qui était simple à anticiper pour les adversaires et entravait l’initiative et la créativité de ses coéquipiers.

Le retour du jeu traditionnel d’Arsenal

Bis répétita cette été. Arsenal a perdu une fois encore ses meilleurs joueurs en la personne de Robin van Persie et Alex Song. Dans le même temps, Olivier Giroud, Lukas Podolski et Santi Cazorla sont venu renforcer et remplacer les départs. Et cela, sans compter les retours d’Abou Diaby et de Jack Wilshere qui vont faire un bien fou à l’équipe d’Arsène Wenger.

Alors que l’on parlait de catastrophe pour Arsenal de voir partir Robin van Persie et Alex Song, il semblerait que jusque là, ces départs ont eu un effet libérateur pour certains joueurs qui se sont responsabilisé. Mais c’est surtout le jeu d’Arsenal qui en a bénéficié car Arsenal a retrouvé, en ce début de saison, le jeu de passe rapide et de mouvement qui ont fait la notoriété d’Arsenal au début des années 2000. Désormais, Arsenal évolue sans réel milieu défensif, un pari très risqué compte tenu de l’engagement et de l’intensité de la Premier League. Mais Mikel Arteta, que Wenger a replacé à ce poste, est devenu le rempart invisible de la défense en harcelant les adversaires, en utilisant sa science du placement pour se trouver au bon endroit et au bon moment. Sa qualité technique lui permet de ressortir le ballon rapidement et proprement, permettant ainsi de gagner du temps sur le replacement adverse. Son entente quasi parfaite avec Santi Cazorla facilite encore plus le jeu d’Arsenal et le fluidifie. Ce qui avait manqué à Arsenal en 2011-2012. Le lutin espagnol, est à Arsenal depuis un peu moins de trois mois et s’est déjà affirmé comme le meneur incontestable et probablement l’une des meilleures recrues en Angleterre ! Malgré l’absence d’un milieu défensif de métier, la future composition du milieu d’Arsenal : Arteta, Diaby/Wilshere, Cazorla promet de très belles choses. Avec un milieu d’une telle qualité technique ne puisse réussir à faire sauter le verrou de n’importe quelle défense. Avec le soutien des appels d’Olivier Giroud dans l’axe et des ailiers, Lukas Podolski, Gervinho et Theo Walcott, capable d’effacer leurs vis-à-vis et efficace devant le but, le danger pourra venir de partout. L’arrivée de Santi Cazorla offre une nouvelle possibilité tactique à Arsenal : les tirs de loin. L’Espagnol est capable aussi de marquer sur coup-franc et d’offrir une alternative à Mikel Arteta.

Défensivement, l’arrivée de Steve Bould a redonné des couleurs à une défense en grande difficulté la saison passée. Les latéraux, Carl Jenkinson et Kieran Gibbs ont fait beaucoup de progrès défensivement. Per Mertesacker, après une année difficile, semble s’imposer comme le patron de la défense, en profitant des blessures de Koscielny et de sa méforme de début de saison. Sa taille, son timing et sa capacité à anticiper ont été essentielles à Arsenal en ce début de saison.

La seule chose certaine, c’est que cette équipe a un potentiel énorme compte tenu des blessures, de la jeunesse de l’effectif et de la présence de jeunes joueurs à fort potentiel derrière. Le retour à un noyau de joueurs britannique par Arsène Wenger, philosophie qui a permis à Arsène Wenger de remporter trois Premier League, laisse espérer un retour à court terme d’Arsenal au premier plan en Angleterre et en Europe.

#Yann


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