Quelles seront les conséquences d’un Brexit dur sur la Premier League? (2/2)

Après de très longues discussions, mêlant conflits et désaccords depuis 2016, le Brexit va finalement entrer en application ce vendredi 31 janvier à 23h au Royaume-Uni (minuit heure française). Un bouleversement géopolitique qui ne va pas forcément être ressenti aussitôt. La Premier League, et Arsenal, pourraient, par conséquent, être affectés. Mais concrètement, quels pourraient être ces changements ? En quoi la Premier League pourrait-elle être différente ? 

Pour en apprendre davantage sur les potentielles conséquences d’un hard Brexit, nous avions interviewé en mai 2019 (date initialement prévue pour le Brexit) Anthony Alyce, fondateur d’Ecofoot et journaliste spécialisé dans l’économie du sport. Interview.

*Première partie de l’interview à retrouver ici

Concernant les droits TV ou les contrats avec les sponsors, le Brexit va-t-il changer quelque chose  ? 

Ce sont des contrats en livres sterling donc si la livre venait à baisser en valeur, forcément les clubs de Premier League rencontreraient une baisse de compétitivité par rapport aux autres clubs du vieux continent.

Après, un autre élément qu’on n’a pas forcément évoqué et qui est en lien avec ce changement d’organisation du football européen, on sent qu’il se passe beaucoup de choses au niveau de la réorganisation des coupes d’Europe. On parle de plus en plus de la Ligue des champions encore plus fermée pour 2024 et en même temps la création d’une 3e compétition européenne pour un peu satisfaire le reste du continent.

Il faut savoir que les clubs anglais jusqu’à présent avaient été plutôt très frileux sur ce sujet parce qu’ils évoluaient dans le meilleur championnat européen, celui qui générait le plus de revenus et le championnat le plus globalisé.

A propos de ce projet de créer une ligue fermée, un peu concurrente d’ailleurs à la Ligue des champions, les dirigeants des clubs anglais avaient été sondé en priorité pour essayer d’échafauder ce projet. A la surprise générale, ces derniers avaient résisté à l’idée. Là, le Brexit peut changer la donne parce qu’aujourd’hui les patrons des grands clubs anglais peuvent se dire qu’ils rencontreront peut-être des difficultés sur le marché domestique.

Du coup on sent que leur position a changée et qu’aujourd’hui dans les discussions, notamment qui sont menées au sein de l’Associatio européenne des clubs, on sent les clubs anglais avoir une position plus volontaire dans l’organisation d’une compétition européenne qui prendrait plus de place dans le calendrier et qui ferait une place plus grande aux gros clubs et ça c’est très certainement une conséquence du Brexit.

Alors, abordons désormais les permis de travail. Concrètement, qu’est-ce que le Brexit va changer ? 

La fédération anglaise a essayé de pousser du mieux possible, surtout sous la présidence de Greg Dick, les quotas de joueurs nationaux. Du coup, le droit européen a permis de mettre des garde-fous face à de telles mesures puisqu’il n’était pas possible d’obstruer à la libre circulation des travailleurs européens. D’ailleurs le permis de travail a été durci mais uniquement à destination des joueurs ayant une nationalité hors Union européenne. Une sortie du Royaume-Uni de l’UE pourrait permettre à la fédération anglaise, si elle veut continuer dans cette voie-là, d’imposer plus facilement des quotas de joueurs nationaux. Est-ce qu’elle voudra réellement poursuivre dans cette voie, rien de permet de le dire puisque au sein de la fédération anglaise, il y a un turnover des dirigeants en raison de quelques conflits notamment liés à la vente de Wembley, difficile pour moi d’avoir un avis catégorique.

Quelles sont les conditions pour obtenir un permis de travail, et quelles seront les conditions potentielles en cas de Brexit ?

Ça dépend aujourd’hui de deux choses. Premier élément, le classement FIFA de la nation du joueur en question, et enfin le pourcentage de match internationaux joués par le joueur dans sa sélection. Au mieux la sélection est classée, moins il a besoin d’avoir joué un haut pourcentage de match avec sa sélection pour pouvoir être recruté. Pour vous dire, en Premier League, si ce système venait à être appliqué de manière stricte, cela pourrait concerner une centaine de joueurs en Premier League qui pourraient ne pas répondre à ces exigences-là mais après à nouveau, ces questions-là ne sont pas à l’ordre du jour.

Est-ce qu’avec ces changements au niveau des permis de travail, il n’y aura plus la possibilité d’attirer des jeunes joueurs étrangers, européens ou hors-européens, et aussi de faire partir des jeunes anglais vers des pays non européens ?

C’est une question très intéressante qu’on ne se pose jamais, c’est la réciproque. Que va décider l’UE par rapport aux joueurs anglais ? C’est très difficile de répondre à cette question à nouveau. En cas de hard Brexit, on ose imaginer que ces scenarios-là ont déjà été anticipés car la question qu’on se pose par rapport aux joueurs, se posent à tous les niveaux de tous les pays de l’UE. Comment seront organisés les échanges entre les pays ? Peu d’éléments circulent à ce sujet si un hard Brexit venait à être choisi mais on peut penser malgré tout que très rapidement des accords bilatéraux seraient signés entre le Royaume-Uni et ses principaux partenaires économiques, et donc une possibilité de circulation des personnes qui serait maintenue.

Est-ce qu’il y aurait la possibilité de contrats ou d’accords spécifiques pour le football anglais en général ?

Les clubs de Premier League font du lobbying à ce sujet-là auprès de Jeremy Wright, que j’ai mentionné plus tôt dans l’interview. Les clubs essayent de s’assurer qu’en cas de hard Brexit prononcé et qu’on venait à entraver la libre circulation des personnes entre l’UE et le Royaume-Uni, les clubs de Premier League font le nécessaire pour qu’il y ait une exception pour le sport professionnel. Malgré tout, le sport est un petit poids dans le PIB du Royaume-Uni et j’imagine qu’il y aura des dossiers bien plus prioritaires et que ça serait difficile pour les clubs de Premier League d’ériger leurs dossiers en priorité.

*Interview originale à retrouver dans notre émission The Chronic disponible sur Youtube en cliquant ici.

#Albin #Benjamin


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