Arsenal, au royaume des chaises musicales et des grands défis pour l’avenir

Après 2 ans en poste, le départ de l’influent Raul Sanllehi ouvre la voie à de possibles changements en profondeur à Arsenal. Analyse des récents événements et des potentielles répercussions sur le club.

 

Il n’y a jamais vraiment le temps de s’ennuyer du côté d’Arsenal. Depuis le départ de Wenger en mai 2018, le club a beaucoup évolué. Nombreux sont ceux qui ont garni les rangs, et ils sont probablement aussi nombreux à avoir quitté le navire. Dernièrement, et pas des moindres, Raul Sanllehi, sulfureux et surpuissant « head of football » qui a rejoint le club quelques mois avant la retraite de Wenger. Il suit l’annonce du licenciement de 55 personnes en réponse, selon le club, au Covid-19. Un choix des plus surprenants pour un club détenu par un milliardaire, entre autres incohérences. En clair, ce qu’il faut comprendre, c’est que depuis la victoire en FA Cup, il y a une accélération certaine des événements. Pour comprendre, il faut remonter le temps. En 2018, dans le cadre d’une refonte massive de l’organigramme du club, le triumvirat Raul Sanllehi-Ivan Gazidis-Sven Mislintat devait diriger, mais il n’a jamais vraiment eu le temps (ou le club la volonté) de le faire. Gazidis a rejoint l’AC Milan quelques mois après avoir (enfin) réussi l’objectif de sa vie, le recruteur allemand en a fait de même après des désaccords profonds avec d’autres membres de la direction, et le Catalan vient de partir d’un soi-disant « commun accord » selon le communiqué officiel d’Arsenal. Ces trois-là, dont surtout Gazidis, étaient vraiment les hommes de la transition post-Wenger. 

 

Arteta-Edu, un duo au centre des choix sportifs 

 

Edu et Mikel Arteta, nouveau tandem responsable du sportif

 

Le bilan sportif du règne de Sanllehi n’est pas optimal. Loin de là. Arsenal a terminé cinquième puis huitième cette saison. Il est celui qui, entre autres, a validé la nomination d’Unai Emery puis a milité pour sa prolongation en dépit de l’échec malheureux de l’Espagnol. C’est également lui qui a fait venir Edu, directeur technique qui va désormais prendre le contrôle du sportif avec Mikel Arteta. Le Brésilien va se retrouver propulser sur le devant de la scène, lui qui s’est jusqu’ici montré plutôt discret, publiquement du moins. Huss Fahmy, le « spécialiste des contrats » doit conduire les négociations pour les transferts. Jusque-là, que ce soit Edu ou Fahmy, ils n’ont pas vraiment été dans la lumière. D’ailleurs c’est davantage Raul Sanllehi que Fahmy qui négociait les contrats alors même que c’est très précisément ce pour quoi il a été recruté en provenance de Team Sky. N’était-ce pas dans leurs prérogatives, n’avaient-ils pas le « droit » parce que « Don Raul » était le boss de tout ? Difficile de le savoir. Quoi qu’il en soit, ils ont maintenant la charge de tenir leur rôle respectif et ont une quantité astronomique de travail. Citons par exemple les 5 joueurs en fin de contrat en 2021 (Aubameyang, Mustafi, Özil, Sokratis, David Luiz) et les 7 en 2022 (Lacazette, Guendouzi, Kolasinac, Nketiah, Chambers, Martinez, Elneny). Plusieurs vont indéniablement partir avant l’échéance de leur bail, mais d’autres devront être prolongés. Sans parler des différents mercatos qui seront nécessaires pour renforcer l’effectif et tenter, à terme, d’en faire à nouveau une grande équipe.

 

En termes de recrutement, il y a de quoi être critique, aussi. Arsenal a décidé de désintégrer sa cellule de recrutement, avec notamment Francis Cagigao, reconnu par tous. D’autres scouts vont ou ont quitté le club. Arsenal a très clairement choisi une approche quelque peu différente du scouting « classique » pour diligenter son recrutement ces derniers temps : celle basée sur le réseau et les agents. En témoigne donc ces nombreux départs, en plus de celui du patron de Stats DNA, Jason Rosenfeld. Sanllehi avait le carnet d’adresses. Son départ va probablement changer la donne, sans savoir jusqu’à quel point. Pour le mercato actuel, le club se basera sur les rapports déjà collectés et les recommandations de Sanllehi ou des recruteurs. C’est à moyen et long-terme qu’il faudra suivre ce dossier. Mais l’ancien du Barça a bel et bien piloté les arrivées de David Luiz, Pablo Mari ou Cedric. Le premier a été prolongé en dépit de prestations sportives des plus bancales, le second prêté puis définitivement acheté alors qu’il a joué 3 matches au club et a depuis été blessé, même situation pour Cedric qui n’a pas franchement crevé l’écran mais a été signé 4 ans. Ou encore le “tonitruant” prêt de Denis Suarez la saison passée. Sanllehi, tout comme Edu d’ailleurs, est très proche d’Arturo Canales, l’agent d’Emery et de Pablo Mari. Il l’était aussi de Kia Joorabchian dont l’influence à Arsenal ne cesse de grandir et d’inquiéter. On apprend par exemple dans un article de The Athletic (à retrouver à la fin) que la signature du contrat et les photos pour l’officialisation du transfert de Willian ont été prises chez l’agent. Raison officielle : Covid-19. Dérangeant, et l’accumulation de ces petites anomalies aurait titillé les propriétaires.

 

Les Kroenke se réveillent (enfin)

 

NOTTINGHAM, ENGLAND – FEBRUARY 29: Josh Kroenke Arsenal Director and Vinai Venkatesham the Arsenal CEO before the FA Women’s Continental League Cup Final Chelsea FC Women and Arsenal FC Women at City Ground on February 29, 2020 in Nottingham, England. (Photo by David Price/Arsenal FC via Getty Images)

 

En outre, il y a quelques semaines, un avocat proche des Kroenke, Tim Lewis, a été nommé au board comme membre non exécutif. Selon les médias anglais, il a pour mission de conduire une enquête interne – ce qu’Arsenal réfute – sur un certain nombre de points. Dont les transferts, et les sommes payées. Comme pour les 80M de Pépé, ou les millions dépensés pour Leno ou Torreira qui ont pu être surpayé. C’est également une façon d’analyser et de rendre des comptes sur le fonctionnement global du club. Josh Kroenke semble être à la manœuvre de cette récente réorganisation, et le départ de Sanllehi n’est pas une coïncidence ou aussi amical qu’Arsenal souhaite le laisser paraître. Les différents deals plus ou moins opaques, les guerres d’égo et la stagnation du club n’ont pas tellement plu à KSE, les propriétaires, et surtout à Josh. Eux qui sont d’habitude si discrets et régulièrement la cible numéro 1 des supporters. Désormais, pour reprendre le contrôle des opérations, on retrouve Vinai Venkatesham. Jusque-là, il travaillait en duo avec Sanllehi, chacun ses taches et prérogatives distinctes. Lui était en retrait du sportif, plus dans le commercial, le marketing, les sponsors etc. Son rôle sera différent de celui qu’avait Sanllehi, car le duo Edu-Arteta prend la main sur le sportif. Mais Venkatesham est maintenant le plus haut placé en-dessous des Kroenke dans l’administration et la gestion d’Arsenal. Voilà donc deux ans que l’organisation d’Arsenal est quasi incompréhensible, avec quantité de rôles mal définis ou en apparence inutiles, des changements incessants et un turnover régulier. C’est l’occasion de retrouver un peu de stabilité, de sérénité notamment pour Mikel Arteta. Et surtout une vision d’avenir. 

 

Naturellement, des questions se posent. Certaines déjà évoquées plus haut. Qu’est-ce que cela aura comme impact sur la façon dont Arsenal se positionne sur le marché des transferts, autant dans le ciblage des potentielles recrues que dans la concrétisation de leur arrivée ? De nouvelles têtes vont-elles tomber et d’autres arriver ? Le grand ménage n’est peut-être pas terminé. Le départ de Sanllehi peut-il changer la donne en ce qui concerne les négociations en cours, par exemple pour Gabriel, Partey ou la prolongation d’Aubameyang ? C’est peut-être l’opportunité parfaite pour remettre le club sur de bons rails, autant sur le terrain qu’en coulisses. Arteta est un vrai passionné d’Arsenal, il a la confiance du board, de ses collègues, des joueurs et surtout des supporters. Il semblerait qu’il se dirige de plus en plus vers un rôle de « manager » plutôt que celui de « head coach » pur et dur comme avait Unai Emery. Un mix entre Arsène Wenger et l’ancien coach de Séville en somme. C’est d’ailleurs probablement un point qui a été abordé lors de sa nomination, et on peut aisément imaginer que ce fut un des souhaits de l’ancien adjoint de Manchester City. Mais quel sera précisément son rôle pour tout le domaine sportif ? Edu va-t-il avoir plus de poids que lui au niveau du recrutement ? Il va falloir du temps pour reconstruire ce qui a été complètement démantelé depuis des mois, voire des années. Mais après le départ de Sanllehi, l’optimisme est probablement la norme, dans ce qui pourrait être un premier pas vers la rédemption. 

 

Sources et lectures complémentaires : 

 

Explained: Why Sanllehi left Arsenal and what it means for Arteta and Edu https://theathletic.com/2000020/2020/08/17/raul-sanllehi-questions-answered/

 

Raul Sanllehi’s departure gives Arsenal the chance to do things differently https://theathletic.com/1997540/2020/08/15/raul-sanllehi-arsenal-left/ 

 

Arsenal take firm transfer dealings action with exit of Raul Sanllehi https://www.theguardian.com/football/2020/aug/15/raul-sanllehi-arsenal-head-of-football-leaves-club 

 

The spotlight falls strongly on Edu and Vinai https://arseblog.com/2020/08/the-spotlight-falls-strongly-on-edu-and-vinai/

 

Les podcasts d’Ornstein et Arseblog extra https://arseblog.com/2020/08/arsecast-extra-episode-368-17-08-2020/ et https://theathletic.com/podcast/144-the-ornstein-and-chapman-podcast/

 

Thread Deslandes https://twitter.com/AntoDeslandes/status/1291436591593000960?s=20 

 

Power shift shows Mikel Arteta is already more than a head coach to Arsenal https://www.independent.co.uk/sport/football/premier-league/arsenal-news-raul-sanllehi-mikel-arteta-structure-transfers-epl-a9672961.html 

 

Arsenal review £72m Pepe transfer https://www.espn.co.uk/football/soccer-transfers/story/4158763/arsenal-investigate-72m-pepe-transfer-barcelona-start-hunt-for-new-boss

images soumises à droits d’auteurs

Jeremy Docteur @BackoTheDoc 

 


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