Freddie Ljungberg, Coach Modèle (1/2)

Freddie Ljungberg a été nommé entraîneur d’Arsenal après le licenciement d’Unai Emery, consécutif à une série de 7 matchs sans victoire. Cet article coécrit par Amy Lawrence, David Ornstein et James McNicholas traite de la transition de Ljungberg, de joueur à entraîneur.

Freddie Ljungberg n’a pas toujours rêvé de devenir coach. Steve Zakuani, qui a joué à ses côtés aux Seattle Sounders en MLS, en atteste :” Si on m’avait demandé il y a 10 ans ce que Freddie ferait plus tard, je n’aurais pas dit coach. J’aurais dit restaurateur, ou peut-être mannequin”.

Un homme avec autant de centre d’intérêts différents n’avait pas vraiment le profil idéal pour rester dans le milieu du football. Il n’en avait pas besoin non plus.

“Je pense que le football est entré dans une nouvelle ère”, déclare son ancien coach avec lequel Freddie a vécu ses meilleurs moments, Arsène Wenger. “Maintenant, lorsqu’un joueur finit sa carrière, il est souvent assez riche et assez connu, il n’a donc pas vraiment besoin de faire un autre travail. C’est pourquoi je suis vraiment fier d’eux quand ils le font, car ils peuvent continuer à faire vivre et transmettre les valeurs du club aux nouvelles générations.

Et c’est exactement ce que Ljungberg fait. Les fans d’Arsenal qui se souviennent du joueur à la coupe de cheveux aussi extravagante et colorée que sa personnalité commencent à être habitués à sa présence dans les coulisses et sur les terrains d’entraînement du club. Toujours avec son style incomparable, sa concentration à toute épreuve, et avec un but nouveau.

Ljungberg attaque sa nouvelle carrière de coach. Après avoir pris des jeunes comme Bukayo Saka ou Joe Willock sous son aile ; après s’être rendu indispensable dans les travée de l’Emirates et de London Colney. Il a même appris les rudiments de l’espagnol afin de pouvoir communiquer plus facilement avec Unai Emery et son équipe. C’est un changement considérable pour un joueur qui a longtemps été indécis sur la suite de sa carrière dans le football.

Ljungberg parle de ce qui l’a ramené vers le football dans une interview sur la chaîne YouTube des Sounders : “Quand vous prenez votre retraite, votre rêve, enfin en tout cas le mien, est de pouvoir se dire qu’on peut enfin faire ce qu’on veut, que personne ne nous dit quand on doit se lever, quand on doit courir… On rêve de ça pendant près de 20 ans, et quand ça arrive, et qu’on ne fait rien pendant un an ou deux, on finit par se lasser.”

C’est à ce moment que Ljungberg a consulté l’homme qui a façonné sa carrière, Arsène Wenger, pour avoir des conseils sur la suite à donner à sa vie : “J’ai posé la question à plusieurs personnes au sein de l’équipe nationale de Suède, et j’ai demandé à Arsène ce qu’ils pensaient de moi en tant que coach, ou si c’était juste une idée stupide. Ils m’ont tous répondu qu’ils voyaient cela comme une très bonne idée, et c’est là que j’ai décidé de m’y essayer.” Beaucoup de fans d’Arsenal le savent, quand Ljungberg frappe, il marque très souvent.

Lorsque Ljungberg a passé ses diplômes de coach, les cours exigeaient qu’il passe quelques jours à travailler avec des jeunes joueurs dans un club de son choix. Il a choisi le club d’Halmstads Bollklubb, le club suédois où il a commencé sa carrière.

Nicklas Gudmundsson était un des coéquipiers de Freddie lors de sa première saison là-bas, et se souvient d’un jeune garçon qui était toujours très calme, sauf sur le terrain. il explique : “Il avait 17 ans lorsqu’il a été promu en équipe première. Il était assez timide dans les vestiaires. Il était quelques fois en retard aux entraînements, mais nous avons tous vu qu’il avait du talent et qu’il pourrait faire une belle carrière.

Quand il a commencé à jouer plus régulièrement, il s’est installé dans l’équipe. On se souvient tous de la finale de la Coupe des Vainqueurs de Coupe (C2) contre Parme en 1995. Il avait 18 ans et venait de dribbler Hristo Stoichkov. Il a pris un coup de coude de ce dernier, s’est relevé immédiatement et l’a confronté sans peurs. Il a toujours eu une grande confiance en lui.

C’était un gars ordinaire originaire d’Halmstad qui aimait le football. Tout le monde à cette époque était à peu près comme ça. Même si vous avez du talent, vous ne pouvez pas le fanfaronner comme ça dans une ville de cette taille. Ce n’est pas Zlatan Ibrahimovic.”

Gudmundsson, qui est 5 ans plus âgé que Freddie et a découvert la Premier League 3 ans avant lui, se souvient du sérieux dont lui et sa famille ont fait preuve au niveau de sa progression.

“Ça a toujours été la priorité à sa carrière. il était très professionnel. Mon père était le président de l’association des parents d’Halmstads Bollklubb et la mère de Freddie discutait beaucoup avec lui lorsque je suis parti jouer à Blackburn. Ils étaient très intéressés de savoir comment cela se passait pour moi. Toute sa famille était très impliquée et Freddie était déterminé à devenir un footballeur professionnel.”

Markus Wephton vit à Halmstad et est un fervent supporter d’Arsenal et de son équipe locale depuis des dizaines d’années. Il se souvient d’un gamin au dessus du lot lors de ses premières années au sein du club suédois :” Lorsque je sortais en ville, je ne le voyais jamais. J’avais à peu près le même âge que beaucoup de joueurs de l’équipe, et je les croisais régulièrement dans les bars ou les boites de nuits. Mais pas Freddie. Il avait déjà cette réputation d’être très sérieux. Cela se ressentait beaucoup à l’époque.”

Il était connu pour amener son oreiller lors des déplacements en car du club, et s’endormait avant même d’atteindre l’autoroute. Il parlait peu mais était respecté de par la façon qu’il a eu d’arriver dans l’équipe et de s’y imposer.

Le passage de Ljungberg à Halmstad est commémoré sur le mur des souvenirs du club, dans le quartier sportif de la ville, aux cotés notamment de Roy Hodgson, qui a gagné les premiers titres du club dans les années 70, dans ce qui était alors son premier poste d’entraîneur. 

Ljungberg a été sur les tablettes d’Arsenal dès ses 16 ans, mais a préféré rester en Suède jusqu’à ce qu’il se sente prêt. Cela convenait à Arsenal, jusqu’à ce qu’une performance hors norme du jeune suédois face à l’Angleterre lors d’un match international en 1998 attire les projecteurs sur lui. Arsenal a dû accélérer le processus, pour éviter la concurrence d’autres clubs anglais comme Chelsea. Mais Wenger était déterminé à le recruter.

A son arrivée à Arsenal, Ljungberg a vite compris que Wenger lui avait réservé un changement de poste. Lui qui a toujours joué en tant que meneur de jeu, s’est retrouvé sur une aile. Ce changement l’a laissé perplexe, et il n’était pas très emballé. Après sa première saison à Londres, il a rencontré ses agents pour discuter de la suite à donner à sa carrière. Il ne se sentait pas comme un ailier, et envisageait de trouver un club où il aurait une réelle position axiale. Il était intransigeant avec lui même, et voulait tirer le meilleur de ses qualités.

Comme il l’explique dans son livre “Invincible” :” J’ai décidé de venir à Arsenal car j’aime le club. J’aime Arsène, j’aime mes coéquipiers. J’ai beaucoup appris cet été là, et j’ai changé mon attitude. Au lieu de me plaindre, j’ai travaillé plus dur. A 21 ans, j’ai appris à jouer comme un ailier.”

La suite – les appels, les buts, les passes décisives, les trophées, la saison des invincibles – Tout ceci fait partie de l’histoire du club, et de celle de Freddie Ljungberg.

Beaucoup de personnes présentes au club à cette époque là se souviennent d’un homme intelligent, ouvert d’esprit et non-conformiste. Le parallèle avec Hector Bellerin est évident.

Il a évidemment son propre caractère. Un ancien membre du staff d’Arsenal se souvient :” En 2000 ou en 2001, Freddie a appelé un membre du staff vers minuit. Il dormait paisiblement, et quand il a vu que son téléphone affichait “Ljungberg”, il a préféré répondre. Sans même dire bonjour, Freddie demande :”Je suis dans le centre ville de Londres, je peux me garer sur une ligne jaune?” Freddie n’était pas ivre, mais cela montre que ses standards sociaux sont différents”.

Son abstinence à l’alcool a participé à la construction de sa carrière. Derrière ses airs d’esprit libre et de gaillard se cache une hygiène de vie et un quotidien strict.

Il voulait toujours être sur la même table de massage ou de kiné, déplacer son rendez-vous de 20 minutes l’irritait. Il demandait aux médecins le contenu et le but de chaque médicaments qu’ils lui suggéraient d’avaler. Une allergie au fromage le poussait à éplucher les menus de tous les endroits où il mangeait.

Même sa vie à l’extérieur du club et des entraînements était stricte. Il vivait à Hampstead, dans le nord de Londres et mangeait souvent dans le même restaurant Italien. Pour éviter d’être reconnu, il mangeait en cuisine avec le chef. 

Peut-être que tout ces détails était les premiers signes qui montrent que Freddie sera un bon coach à l’avenir.

Son ancien coéquipier à Arsenal, Lee Dixon, n’est pas surpris par le chemin qu’emprunte Freddie : “j’ai toujours pensé qu’une grosse partie du jeu de Freddie était basée sur son intelligence et sa capacité à prendre les bonnes décisions. Quand vous jouez comme il le faisait, il faut être intelligent. Il faut connaitre le jeu, savoir ce que les défenseurs vont penser. Il ne jouait pas à l’instinct. Il pouvait savoir où les espaces allaient se créer, et à quel moment déclencher sa course. Lorsque l’on a ces capacités, on a ce qu’il faut pour devenir coach. Sa détermination est si grande qu’elle est inchiffrable.”

Wenger ne tarit pas d’éloges sur la mentalité de Ljungberg :” Il était un incroyable guerrier. Il pouvait puiser dans ses ressources même lorsqu’il était mort, grâce à cet esprit combatif”.

Ce fameux esprit a contribué à faire de Freddie une légende d’Highbury. Et le sentiment était réciproque : Il est tombé amoureux de Londres, et y vit encore maintenant. Mais entre les deux, il y a eu l’Allemagne.

 

Lorsqu’Andries Jonker a été intronisé coach de Wolfsburg en février 2017, l’hollandais a présenté ses assistants. Oliver Mutschler en tant que coach physique et Uwe Speidel en tant qu’assistant. Mais Jonker n’avait pas fini.

“L’autre nom va vous parler, Freddie Ljungberg arrive”.

 

Article recueilli sur theathletic.com, traduit de l’anglais par Matthieu Rolland. Images tirées du site Icon Sport.com. 

 

 

 

 

 


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