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Giroud, canonnier controversé
Adulé le long de la Méditerranée, préféré à la pointe de l’attaque des Bleus par de nombreux Français, Olivier Giroud réalise une fulgurante ascension depuis quelques années. Des terrains de Ligue 2 aux cieux du stade Vicente Calderon, trônant entre temps sur son piédestal de la bouillonnante Mosson, l’attaquant de 26 ans respire à plein nez les effluves du succès. Et comme transcendé par son titre de champion et sa notoriété grandissante, Olivier décide durant l’été 2012 de se lancer un nouveau défi. Celui de traverser la Manche et de venir poser ses valises du côté de Londres, à Arsenal, club sevré de trophées et jardin d’Eden du « made in Ligue 1 ». En un an, le Français divisera bien des avis. Entre chauvinisme exacerbé et comparaison « Chamakhienne », rétrospective d’une année compliquée, mais encourageante.
Une adaptation tout en douceur.
« Na na nananaa Girouuuud » résonnait déjà lors des premières journées de championnat, d’une force survoltée lors du déplacement à Anfield. Le Français n’aura pas mis longtemps à être adopté par les supporters rouges et blancs. Serait-ce l’orgueil de tout un peuple qui voit en sa prestance le chasseur du fantôme du Hollandais volant ? Ils auraient eu bien tort. Car Giroud est Giroud, bien loin des gestes gracieux de Van Persie et de sa palette technique infinie. Méconnu de l’autre côté de la Manche, les Anglais sont rapidement partagés. D’un côté ceux qui s’égosillent sur le son des Beatles, et de l’autre les médisants, ceux qui voient en lui une version toute fraiche de Chamakh. Force est tout de même de constater que le Français évolue à un tout autre niveau que celui de l’ancien Bordelais. Doué techniquement et relativement rapide pour son gabarit, sa frappe de mule expédie aux oubliettes les buts de raccroc de son homologue marocain. Giroud démontre très vite sa qualité d’appel, principale raison de son succès au classement de buteurs de Ligue 1. Le Français exécute les bonnes courses, les bons mouvements, généralement aux bons moments, mais fait perdre des points précieux. En effet, si ce dernier avait opéré en France avec une précision chirurgicale, il manque plusieurs fois l’immanquable lors de ces premiers matches, notamment face à Sunderland et Chelsea et plus récemment lors de la réception d’Everton. Le joueur veut se montrer, veut briller. C’est son tempérament. A tel point qu’il en perd au début son altruisme, une des grandes forces qui le démarque des autres attaquants. Car si Olivier Giroud est avant tout une pointe fixe, il n’en est pas moins un véritable serial passeur. Deuxième meilleur assistant du club toutes compétitions confondues, il est souvent pris comme point d’appui à l’entrée de la surface, ce qui lui permettra par deux fois de délivrer deux caviars pour ses compères de l’aile gauche, Gibbs et Podolski. Ledit Allemand aura d’ailleurs joué un rôle très important dans l’intégration du Français. Avant tout son ami en dehors du terrain, il aura aussi en compagnie de Theo Walcott empêché toute hégémonie à la pointe de l’attaque. Placé sur le banc après son mauvais début de saison, le déclic viendra finalement tardivement en Premier League, un soir d’octobre face à West Ham. Ce soir-là, Olivier participe à la fête en marquant et en assistant Walcott d’une superbe passe au milieu de terrain.
Seize buts plus tard, des questions demeurent. Giroud peut-il porter seul l’attaque rouge et blanche ? Son profil s’adapte-t-il à Arsenal ? Est-il assez décisif ? Aussi insensé que cela puisse paraitre, l’ex-Montpelliérain est le symbole même de l’après Van Persie. En compagnie de Cazorla, Podolski et Walcott, il est le renouveau de cet Arsenal collectif qui veut faire oublier le « One man team » hollandais. Si le raisonnement de Wenger pourrait être considéré comme un aveu de faiblesse chez certains, il faut aussi admettre que le coach alsacien est allé chercher un attaquant deux fois plus complet que son ancien génie. Giroud est avant tout un garçon qui se met au service de l’équipe, qui joue pour elle et non l’inverse. Il est buteur, passeur, défenseur. Il est la représentation de cette formation qui, on le rappelle, est la deuxième meilleure attaque et troisième meilleure défense du Royaume. Giroud est, au même titre que ses coéquipiers, l’artisan de ces florilèges de buts et de ces passes spectaculaires auxquelles on a pu assister cette saison. « C’est un garçon généreux, engagé » témoignait son ancien coach René Girard. Le coach vacant du MHSC est dans le vrai. Et son ancien protégé n’a jamais caché son adaptation fulgurante au style de jeu bagarreur anglais. Les coups, le jeu à l’épaule, la protection de balle, les duels aériens avec les colosses d’outre-Manche, Olivier a su s’y adapter facilement. Son « WHAT ?! WHAT ?! WHAT ?! » face à Olsson était autrement plus impressionnant que la poussette de Gervinho à ses débuts sur Barton. Le Savoyard a selon toute vraisemblance un certain fighting spirit qui coule dans ses veines. On a de ce fait souvent tendance à oublier que ce n’est que sa première année en Premier League, d’où ses problèmes d’adaptations dans le jeu. Le Français doit faire face à une discipline tactique cent fois supérieure à celle pratiquée dans l’Hexagone, et il en a surement plus que jamais fait les frais ce mardi face à Everton. Il n’est pas inutile de rappeler qu’en concordance avec cet inéluctable fait, le poste d’attaquant est probablement celui qui demande le plus d’effort d’adaptation. Passer du jour au lendemain de Martial et Puygrenier à Kompany et Cahill n’est pas tâche aisée. Olivier doit trouver les espaces entres les lignes, doit réaliser des mouvements chirurgicaux pour se défaire d’un marquage deux fois plus strict que celui qu’il avait connu lors des précédentes années. En ce sens, on ne peut lui demander de retrouver immédiatement le rendement qu’il avait eu lors de l’année du titre à Montpellier. La patience est de mise, d’autant plus que Giroud n’a jamais été éblouissant lors de sa première saison dans un club. A Tours comme à Montpellier, le Français, pas réellement transcendant à son arrivée, a littéralement explosé sur sa deuxième saison en passant par deux fois la barre de vingt buts. Or, si on jette un coup d’œil à ses statistiques londoniennes, ces dernières sont nettement supérieures à celles de ses premières saisons passées dans ses deux précédents clubs. Encourageant dîtes-vous ?
Un profil atypique.
Mais le problème, qui en réalité n’en est pas vraiment un, ne relève pas de ses statistiques mais plutôt de son profil. En faisant venir Giroud à Arsenal, Wenger devait s’attendre à ce que son nouveau protégé change le jeu offensif. En effet, contrairement à Van Persie, Adebayor ou encore Henry, le Français possède un jeu dos au but qui ne lui permet pas de venir décrocher trop bas. Les chances de le voir marquer une copie conforme du but du King face au Real Madrid semblent minimes. Est-ce pour autant une tare ? En aucun cas. Giroud n’est là pour remplacer personne. S’il est là, c’est surement parce que Wenger a vu en lui un renouveau pour son attaque, et il faudra de ce fait du temps avant que les rouages soient parfaitement huilés. La plupart de ses buts marqués avec le MHSC l’an passé sont le produit d’un enchainement appel-passe en profondeur. Combien de buts a-t-il inscrit cette saison de cette manière ? Un seul, celui en coupe sur une magnifique ouverture du défunt Diaby. D’où la nécessité de travailler cet aspect du jeu avec ses coéquipiers. Car si Giroud n’a rien perdu de son exceptionnelle qualité d’appel, il faut que ses mouvements s’inscrivent dans le jeu de ses collègues. Le natif de Chambéry souffre directement du style de jeu d’Arsenal développé l’an dernier, où Van Persie devait la plupart de ses buts aux débordements de Walcott et Gervinho. Aujourd’hui, on retrouve à un degré moindre cette manie de vouloir constamment passer par les ailes, ce qui porte préjudice au jeu vers l’avant. Une pointe fixe comme Giroud va d’avantage rechercher la profondeur. En suivant ce raisonnement, un rapprochement peut également être réalisé avec le fait qu’Arsenal peine considérablement à jouer en contre. Grande force de l’équipe il y a encore quelques années, cette stratégie aurait pu également profiter aux appels de sa nouvelle pointe. Mais encore une fois il n’en est rien en raison de ce ralentissement du jeu lors de phases d’attaques rapides. Mais à travers ces incompatibilités, Giroud montre alors sa grande force et sa détermination en mettant en avant d’autres facettes de son jeu. Il se métamorphose en passeur devant la surface, décroche pour des une-deux, vient aider sur coups de pieds arrêtés défensifs, et utilise sa tête pour effectuer des déviations. Ces dernières forment l’autre épineux problème. En effet, qui n’a pas vu au moins une fois cette saison l’ancien Tourangeau exprimer son mécontentement suite à une de ses déviations dont personne ne profitait ? A chaque long ballon à sa destination, aucun joueur du front de l’attaque ne pense à passer dans son dos. Ni Walcott, ni Podolski, ni Gervinho, ni Cazorla. Son mètre quatre-vingt-douze a beau aspirer le stoppeur adverse et créer des espaces dans son dos, la zone de réception de la déviation reste déserte, symbole de ce refus de jouer le contre. Et ce constat vaut aussi pour les phases de jeu à l’intérieur des seize mètres, où l’on sent bien qu’il n’y a pas assez d’automatismes pour que ses coéquipiers prennent conscience de la force et de la précision de ses déviations.
Vous l’aurez compris, le cas Giroud est encore en chantier. Le profil de l’attaquant Français oblige à des grands déménagements tant qu’il sera la seule véritable pointe dans l’effectif. Tout travail mérite patience, mais la recherche d’un attaquant mobile du genre Jovetic pourrait mettre à profit des qualités qu’il ne peut exprimer pleinement pour le moment. « Il a beaucoup donné jusqu’ici, et il fait les choses bien pour sa première saison » disait Wenger en conférence de presse pas plus tard qu’en fin d’après-midi. Le coach alsacien se refuse à croire à l’erreur de casting, et il a bien raison. Giroud n’est en réalité un flop que pour les éternels mélancoliques de son prédécesseur. Lui avoir collé l’étiquette du nouveau Van Persie était la pire erreur à faire. Olivier n’est pas Robin, au même titre que Robin n’est pas Olivier. Le Français est, tout comme Cazorla, Podolski, Walcott et ses autres coéquipiers, l’un des grands artisans d’une saison collective et solidaire, et cette nouvelle bande pourrait bien annoncer la fin d’une longue période de transition pour Arsenal. Sous l’égide de Wenger, Giroud et ses comparses ont du temps devant eux pour s’aguerrir, se découvrir un peu plus et pour, on l’espère, soulever un trophée.
#Anto.
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