Granit Xhaka : “Il y a trois ans, mes valises étaient prêtes”

Dans un entretien à CBS Soccer, Granit Xhaka a parlé tactique, de la vision de jeu de Mikel Arteta, ainsi que de l’impact du technicien espagnol qui l’a convaincu de rester à Arsenal il y a trois ans. Au moment où sont sortis les épisodes d’All or Nothing, et à l’image du très bon début de saison du Suisse, ses propos prennent tout leur sens. 

Au cours de ses deux ans et demi à la tête d’Arsenal, et malgré des périodes difficiles, l’intelligence de footballeur de Mikel Arteta n’a quasiment jamais été remise en question. Diplômé de la célèbre académie de La Masia de Barcelone, joueur sous Arsène Wenger et entraîneur adjoint de Pep Guardiola ; pendant plus de la moitié de sa vie, l’homme de 40 ans a acquis une base dans l’excellence du football, qu’il essaye de traduire à Arsenal. Malgré deux huitièmes places consécutives, ses joueurs n’ont pas faibli dans leur admiration pour leur manager. Bukayo Saka et Kieran Tierney l’ont tous deux qualifié de “génie”, tandis que Gabriel Martinelli a prédit que l’Espagnol écrira son nom dans l’histoire du football par le poids des trophées. Granit Xhaka n’est pas moins admiratif de l’homme qui l’a gardé au club début 2020.

“Mikel voit des choses que les autres entraîneurs ne voient pas”

Xhaka : “C’est un monstre sur la manière dont il nous explique les séances d’entraînement et le plan de match également. Nous savons exactement ce que nous devons faire. Non seulement la première étape, mais aussi la deuxième et la troisième, avec et sans ballon. La façon dont nous nous préparons ou comment il nous prépare est incroyable. Je n’ai jamais vu quelque chose comme ça auparavant. Nous avons eu une réunion [il y a quinze jours] et il nous a montré une action contre Chelsea. Je faisais le pressing sur Jorginho et Gabi Martinelli est arrivé à ma place. Normalement, Gabi Martinelli est un ailier gauche et les entraîneurs disent qu’il faut rester avec l’arrière droit, mais il a été se mettre en couverture car j’étais monté. C’est ce qui rend Mikel spécial car il voit des choses que les autres entraîneurs ne voient pas à mon avis.”

Malheureusement, Xhaka n’a pas précisé les détails exacts du moment, mais nous pouvons estimer de quel passage particulier du jeu il parlait. Arsenal mène 2-0 lors de son match de pré-saison avec Chelsea à Orlando, le pressing d’Arsenal étouffe les Blues dans leur propre tiers de terrain. L’international suisse, souvent considéré comme un joueur qui manque de rythme pour s’impliquer dans le pressing très haut, est prêt et attend lorsque Marcos Alonso se retrouve sous la pression de Ben White.

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Le pressing pose clairement des difficultés à Chelsea, mais l’espace que Xhaka a libéré pourrait également ouvrir des opportunités aux Blues. Si Jorginho arrive à éliminer son vis-à-vis (Xhaka ici) et se retourner, il pourra peut-être glisser une passe à travers le milieu de terrain d’Arsenal. Martinelli le remarque et, comme Xhaka l’a noté ci-dessus, réagit à la menace plutôt que de simplement faire ce que l’on attend d’un joueur à sa place.

Si Jorginho veut renverser le jeu dans l’espace de droite que Martinelli a libéré, alors Eddie Nketiah est bien placé pour punir toute erreur. Quoi qu’il en soit, si l’Italien réussit cette passe, Chelsea se trouve toujours dans une position beaucoup moins dangereuse que s’il était capable de glisser une passe dans le cœur du jeu.

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C’est loin d’être le seul exemple qui vient à l’esprit des joueurs d’Arsenal, d’une occasion où Arteta a vu quelque chose que peu d’autres font. Assis aux côtés de Xhaka lors d’une discussion pendant le documentaire, l’esprit d’Aaron Ramsdale est rapidement attiré par la sortie de balle amenant le but de Lacazette face à Southampton, où ils ont attiré le pressing adverse et déchiré en quelques secondes. C’était le genre de but dont les grandes équipes d’Arsenal du passé (la Wenger ball) étaient fières. À 19′ 57”, la passe en retrait de Gabriel a déclenché le pressing de Southampton sur Ramsdale. À 20’13”, Alexandre Lacazette pousse le ballon au fond des filets. En cinq passes les Gunners ont fait retourner les joueurs de Southampton dans leur camp, les rendant impuissants.

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Ce but était d’autant plus impressionnant qu’Arsenal avait été contraint de changer son plan tactique lorsque les compositions sont sorties une heure avant le coup d’envoi. “Toute la semaine, nous avons travaillé sur un pressing car ils étaient, je pense, censés jouer à trois derrière”, explique Ramsdale. “Mais quand nous sommes entrés dans le vestiaire, ils jouaient un 4-2-2-2 et Mikel l’a changé. Il avait le plan prêt pour nous, nous l’a dit 45 minutes avant le coup d’envoi, et ce qu’il a dit était parfait.”

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L’admiration que les joueurs d’Arsenal ressentent pour leur manager pourrait même les amener à suivre ses traces. Xhaka a commencé à passer ses diplômes d’entraîneur. “J’ai dit à Mikel d’être prudent”, rit-il – bien qu’à 29 ans, il ne soit pas pressé de quitter le club. “C’est dommage que je n’ai plus que deux ans de contrat. Voyons ce qui se passera après deux ans. Mais je vois un grand, grand avenir pour ce club.”

Une vision aussi optimiste de la vie à Arsenal aurait été inimaginable il y a trois ans, quand Arteta est arrivé et que Xhaka était, comme il le dit lui-même, “terminé” à Arsenal. Il avait été démis de ses fonctions de capitaine après avoir provoqué les supporters et jeté son maillot après un remplacement lors d’un match nul 2-2 face Crystal Palace. Le point de non-retour semblait atteint, le Hertha Berlin était sur le point de ramener l’international suisse en Bundesliga. L’Espagnol a changé tout cela. Après une conversation, Xhaka a décidé – sans même discuter davantage avec sa famille – d’accorder à Arteta les six mois qu’il avait demandé.

“Donne moi une chance pendant six mois” (Arteta)

“Il est la raison pour laquelle je suis toujours au club”, déclare Xhaka. “Tout le monde sait pourquoi je suis toujours là, car il y a trois ans, j’étais parti. Mes valises étaient prêtes, mais j’ai eu une réunion avec Mikel quand il est venu – il voulait entendre mon opinion sur ce qui s’était passé et je lui ai expliqué.”

“Je m’en souviens exactement : je lui ai dit ‘Ça n’a rien à voir avec toi’ parce que je ne le connaissais pas et je n’ai jamais joué avec lui. Évidemment je connaissais son nom mais pas la personne et j’ai dit ‘Je suis parti, je ne peux plus porter le maillot d’Arsenal. Il a dit : ‘Donne-moi une chance pendant six mois et si tu n’es toujours pas satisfait après six mois, je t’aiderai à partir si tu veux. J’en ai parlé à personne et normalement je ne fais pas ça. Mais j’ai dit : ‘OK, Mikel, je vais rester pour toi.’ Et je suis toujours là.” Il y a peut-être des supporters d’Arsenal qui préféreraient qu’il ne soit pas encore là, mais il est juste de dire que ce nombre a diminué depuis qu’Arteta l’a ramené dans le groupe. Xhaka n’a pas été parfait, notamment avec ses cartons rouges et penaltys concédés à répétition, bien qu’il semble être arbitré par sa réputation autant que par ses actions.

S’il y a eu un moment qui a ressemblé à l’inverse de la rage à Crystal Palace, cela aurait pu être son coup de pétard la saison dernière contre Manchester United. Célébrant sa frappe spectaculaire, il a soufflé des baisers qui étaient peut-être en direction de sa loge familiale (exactement comme face à Leicester), mais qui donnaient l’impression d’être pour tout l’Emirates Stadium. “C’était peut-être l’un des plus grands moments depuis sa signature pour ce club”, dit-il. “Tout le monde sait maintenant ce qui s’est passé il y a trois ans. Être assis ici trois ans plus tard pour dire que ce fut l’un des plus grands moments, j’aurais dit que cela n’arriverait jamais, jamais.”

“Xhaka fait partie intégrante de notre groupe, qu’il joue ou non” (Ramsdale)

“Mais je ressens beaucoup plus d’amour de la part des fans, de mon côté aussi. J’essaie à nouveau de construire quelque chose avec eux. Il faut du temps, c’est sûr, mais j’ai le sentiment que nous sommes sur la bonne voie, c’est sûr.” Il n’y a pas que les supporters. Alors qu’on demande à Xhaka d’aborder son rôle de capitaine sans brassard, Ramsdale intervient : “Il fait partie intégrante de notre groupe, qu’il joue ou non. Lorsqu’il s’est blessé au début de la saison dernière, on pouvait sentir sa présence dans le vestiaire. Vous pouvez sentir sa présence quand il joue.”

Ramsdale encore : “Je pense que l’aspect autour du brassard est exagéré. Cela vient de ce qui s’est passé ici avec quelques capitaines au cours des dernières années. Mais ensuite, vous avez des gens comme Rob Holding, un autre qui, quand il ne joue pas, est quelqu’un avec qui tout le monde parle. Nous avons eu quelques disputes sur le terrain, moi et Granit, mais un type de personne qui peut être un grand leader est quelqu’un qui l’oublie juste quand vous entrez dans le vestiaire. Il aura différentes façons de parler en fonction des personnes. Cela tire le meilleur parti de lui et moi quand nous avons une petite dispute. Nous retournons dans le vestiaire et tout va bien.

Les sceptiques d’Arsenal souligneront que toutes ces discussions sur le leadership ne se sont pas traduites par le fait que les Gunners ont réussi à atteindre le Top 4. Ils pourraient avoir raison, mais entendre les joueurs discuter de la situation actuelle est assez convaincant. Ce qu’Arteta a fait à Xhaka fonctionne dans le vestiaire.

Traduction de Granit Xhaka reveals ‘freak’ Arsenal manager Mikel Arteta’s ‘moment of coaching genius’ de CBS Soccer, par Antoine.

Crédits image : CBS Soccer / Icon Sport

 

 

 


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