Kai Havertz : une recrue qui a du sens

Ce n’est qu’une question de jours, voir d’heures avant qu’Arsenal n’annonce sa première recrue estivale du mercato 2023. Kai Havertz se rapproche en effet à grand pas des Gunners contre un chèque de 75 millions d’euros. Piste improbable, voir impensable, il y a encore quelques semaines, le board des Gunners l’a érigé assez vite en top priorité au côté de Declan Rice. Jugé trop onéreux pour certains, joueur trop moyen pour d’autres, l’allemand est aujourd’hui au coeur des débats. Cependant tout le monde est d’accord pour se poser la même question : Kai Havertz, mais pourquoi faire ? 

Havertz : les origines

C’est en Allemange que l’histoire de Kai Havertz démarre, et plus précisément au Bayer Leverkusen. Pur produit du centre de formation, il devient assez rapidement le petit prodige que le club lance dans le grand bain à seulement 17 ans. Le crack du football allemand ne manque pas ses débuts, sous Peter Bosz il est le plus jeune joueur de Bundesliga à atteindre les 100 apparitions pour 38 buts et 30 passes décisives. Peu de joueurs en Europe peuvent se targuer d’une telle précocité. Le talent est là, pas de doutes, une première sélection internationale couronne le tout, à 18 ans seulement.

Mais comment expliquer la précocité d’un tel joyau ? C’est assez simple, Havertz est un joueur ultra polyvalent qui peut occuper tous les postes offensifs. Une polyvalence qui prend sa force dans les caractéristiques physique et technique de Havertz. 1m93, très rapide pour sa taille, doué des deux pieds, ultra technique et peu avare en efforts et courses, le diamant allemand est le joueur complet par excellence, à tel point qu’il est surnommé “Alleskönner”, qui peut sa traduire par “qui peut tout faire” an allemand.

Ailier, faux neuf, milieu box to box ou même double pivot, Havertz sait tout faire avec le Bayer Leverkusen. C’est d’ailleurs Rudi Völler, directeur sportif du Bayer Leverkusen qui en parle le mieux : “Il a le style de course et l’élégance de Mesut Ozil et le physique, la robustesse, la puissance aérienne et le réalisme que Michael Ballack avait à son apogée. Il est devenu l’un des joueurs les plus courtisés en Europe”. 

Courtisé, il va rapidement l’être. Toujours aussi régulier avec le Bayer Leverkusen dans ses performances, et après avoir découvert la Ligue des Champions avec le club allemand, le Bayer Leverkusen sait qu’il ne pourra pas le garder éternellement. C’est finalement Chelsea qui raffle la mise, pour un sacré chèque de 80 millions d’euros. Après 46 buts et 31 passes décisives à seulement 21 ans, l’allemand fait ses adieux à son club formateur et direction la Premier League. 

London Calling

C’est avec les Blues de Chelsea emmené par Franck Lampard que Havertz fait ses premiers pas en Premier League. Tantôt milieu offensif, tantôt pur numéro 9, les premiers pas sont timides. Nouveau pays, nouvelle culture et nouveau schéma tactique, ses premiers pas sont pas toujours convaincant. 4 petits buts et 5 passes décisives lors de la saison 2020-2021, les premières critiques ne se font pas attendre.

A l’image de son équipe, le Chelsea de Franck Lampard ne convainc pas. La polyvalence de Havertz est alors sous le feu de critique : à être bon partout il n’excelle nul part. En effet Havertz n’est pas un redoutable 9, mais plutôt un 9 et demi qui excelle au côté d’un deuxième pur attaquant. À Leverkusen, que ce soit avec Lucas Alario ou Kevin Volland, Havertz remplissait parfaitement ce rôle et l’équipe était construite de la sorte.

À Chelsea, c’est différent. Pourquoi est ce différent ? Car Chelsea et ses numéros 9, c’est un petit peu “L’arlésienne”. Timo Werner, Tammy Abraham, Olivier Giroud, ou encore Romelu Lukaku, Chelsea peine à stabiliser ce poste de pur attaquant de pointe malgré de lourds investissements. Un problème tactique récurrent dont Havertz en pâtit logiquement. 

Franck Lampard limogé, c’est Thomas Tuchel qui reprend le banc des Blues le 26 Janvier 2021. Sous la houlette du coach allemand, Kai Havertz va confirmer sa transition de milieu offensif vers la position de pur numéro 9 dans son nouveau 3-4-3. Un choix par défaut pour Tuchel, faute d’autres solutions tangibles à ce poste. L’effet Tuchel est positif sur Chelsea, qui réussi même à gagner la Ligue des Champions face à Manchester City grâce à un but de … Kai Havertz.

 

C’est sous Thomas Tuchel, la saison suivante, que Havertz réussit sa saison la plus aboutie avec les Blues : 14 buts et 6 passes décisives pour 47 matchs lors de la saison 2021-2022. Pour un joueur qui a joué la plus grosse partie de la saison attaquant de pointe, c’est peu. Trop peu. Pourtant, Thomas Tuchel le soutient envers et contre tous, il sait que Kai Havertz a un talent hors du commun, n’hésitant pas à le comparer à Bergkamp ou Berbatov. Conscient que Havertz n’est pas un pur 9 ni un finisseur d’élite, le projet du coach allemand est simple : le transformer en faux 9 et exploiter les qualités qui l’avaient révélé à Leverkusen.

 
Mais il n’en aura pas le temps. Débarqué à la surprise générale au début de la saison 2022-2023, Chelsea va tomber dans un marasme sportif et politique. Entre rachat, politiques d’investissement lourds et valse des entraineurs, Kai Havertz et l’ensemble des Blues sortent d’une saison catastrophique, loin des attentes fixées. Celle de trop pour Havertz, qui ne souhaite pas prolonger son contrat qui court jusqu’en 2025. En situation d’échec, il prend clairement la porte de la sortie. 

London Forever

Et il n’aura peut être pas à aller bien loin. Kai Havertz n’a, à l’heure actuelle, jamais été aussi proche des Gunners. 

Mais récapitulons : dans une impasse et en échec à Chelsea, pas très bon finisseur, pas vraiment 9, plus vraiment un ailier de métier et assez onéreux : pourquoi Arteta a, d’un seul coup, décidé d’en faire une priorité. Quelle mouche l’a donc piquée. À première vue c’est un transfert qui n’a pas vraiment de sens. 75 millions d’euros pour la doublure de Jesus ou de Saka c’est du gâchis. 

Mais voilà, plot twist : Havertz ne sera ni un back up de Saka, ni un back up de Jesus. 

En effet, pour comprendre pourquoi Kai Havertz fait totalement sens pour les Gunners, prenons deux matchs en exemple : Sa finale de Ligue des Champions contre Manchester City le 28 Mai 2021 et le dernier match de la saison dernière contre Newcastle le 28 Mai 2023. 

Deux postes différents : ailier dans le 343 de Tuchel contre Manchester City et attaquant de pointe contre Newcastle. 2 positions différentes mais un point commun : sa faculté à dézonner. Et plus particulièrement à jouer entre les lignes. Que ce soit attaquant, milieu de terrain ou ailier, la grande force de Havertz est sa faculté à jouer entre les lignes et faire le lien entre les attaquants et les milieux de terrain.

Havertz n’est en effet pas un redoutable finisseur, et c’est ce qu’on retiendra de son passage à Chelsea. Ce qu’on dit moins (voir même pas du tout) c’est que Havertz est un excellent créateur doté d’une science du placement exceptionnellement poussé. Il sait se projeter, presser, jouer verticalement et horizontalement et même défendre (oui oui). Il peut jouer 9, il peut jouer ailier, mais clairement ses stats montrent que Havertz est une arme redoutable au coeur du jeu. 

Mais cela ne répond pas vraiment à la question : comment Arteta va utiliser Havertz ? Eh bien comme écrit juste au dessus, il serait dommage de se priver d’un Kai Havertz au milieu de terrain. Sur le papier, Arsenal a joué l’ensemble de sa saison en 433. En réalité c’est plus complexe que ça. 

A l’instar de Manchester City, Arsenal a plutôt évolué en 3-2-5 en situation offensive. 

 


Saliba et Gabriel en pointe basse avec Zinchenko ou White qui rentrent à l’intérieur pour apporter le surnombre au milieu de terrain au côté de Thomas Partey. Granit Xhaka et Odegaard très haut sur le terrain et très proches d’un Gabriel Jesus qui n’hésite pas à redescendre pour mettre sur orbite Saka et Martinelli.

C’est ici le positionnement de Xhaka qui nous intéresse le plus. Entre les lignes, très proche de Jesus, Zinchenko et Martinelli. Une position parfaite pour joueur qui sait combiner et se projeter comme sait le faire Kai Havertz. Et cela tombe bien, Xhaka est sur le départ et proche de …. Leverkusen (ironique). Arsenal n’attend que son remplaçant pour laisser partir le Suisse.

Autre piste qui laisse penser que Havertz pourrait être utilisé au milieu de terrain : le board ne vise pas vraiment de profils offensifs à part Havertz pour le milieu de terrain. La top priorité est bien sûr Declan Rice, profil plutôt défensif. Mais aussi Roméo Lavia, autre profil défensif. Havertz offre aussi énormément de combinaison possible dans le 11 de départ. Nul doute que Arteta va s’appuyer sur sa polyvalence pour en faire une arme de choix. 

Havertz au milieu de terrain ou sur la ligne offensive : les possibilités sont multiples

Cela reste néanmoins un pari tactique majeur opéré par Arteta si cela se confirme. Arteta n’a jamais démarré une saison sans mettre en place quelque chose de nouveau tactiquement avec les Gunners. Son repositionnement dépendra également du mercato opéré par le board. Le gros chantier reste le milieu de terrain pour cet été. Xhaka sur le départ, Partey n’est pas à l’abri de quitter Londres également.

Bien malin celui qui sait combien de joueurs et qui le board va recruter cet été. Reste néanmoins un joueur qui est en mal de confiance totale et qu’il va falloir remettre en selle, mentalement et physiquement. Havertz n’étant pas un 8 traditionnel, rien n’assure que son nouveau positionnement au milieu de terrain va fonctionner à court terme. Est ce que le board aurait mieux fait de se positionner sur un 8 de métier ? Peut être, réponse dans les prochaines semaines ou prochains mois. 

Pourquoi Arteta en a fait une priorité

Même si tactiquement Havertz fait sens, on peut également se demander pourquoi le board décide pousser si tôt dans le mercato pour le joueur de Chelsea. Plusieurs éléments peuvent expliquer ce focus soudain du board pour “King Kai”. Premièrement, il est devenu une priorité car Havertz s’est transformé en véritable opportunité il y a quelques semaines.

Ne souhaitant pas prolonger avec Chelsea et les Blues souhaitant faire rentrer de l’argent pour esquiver le Fair Play Financier, il a été naturellement mis sur le marché. Prix élevé certes, mais il ne faut pas oublier que Havertz n’a eu que 24 ans il y a 3 semaines. Sa marge de progression est encore énorme, et malgré son jeune âge son expérience de la Premier League est déjà impressionnante, sans parler de la Champions League. Un joueur de 24 ans de Premier League, avec du potentiel et déjà un sacré vécu en championnat et sur la scène européenne, ça se paye. Surtout entre les clubs anglais. 

Deuxièmement : Havertz ne voulait que Arsenal. Un échange avec Arteta a suffit pour le convaincre du projet. Et cela est à mettre au crédit de Arteta qui sait parler aux joueurs et leur expliquer comment il souhaite travailler avec eux. Havertz, Rice, Timber, les joueurs aujourd’hui proches de rejoindre le club sont des joueurs qui veulent vraiment porter le maillot des Gunners aux dépends des autres clubs.

Dans le cas de Havertz, le Bayern Munich était sur les rangs. Un retour au pays aurait pu être le choix de la facilité pour l’Allemand. Mais il n’en est rien, son choix est fait. Il ne veut pas le Bayern, il veut Arsenal, qu’il qualifiera même de “meilleur projet en Europe”. 


Cependant, même si Kai Havertz est devenu une top priorité, on le sait le dossier chaud est bien Declan Rice. En concurrence féroce avec Manchester City, les Gunners touchent au but mais rien n’est encore acquis. Avoisinant les 100 millions d’euros, on peut se demander si le board ne devrait pas prioriser ses dépenses en faisant d’abord Rice puis Havertz. 75 millions d’euros, c’est beaucoup de millions qui pourraient servir sur le dossier du joueur de West Ham. Mais faisons confiance au board sur ces sujets brûlants. 

Arteta voit en Havertz le joueur parfait pour renforcer son secteur offensif. Grosse expérience de Premier League et de la scène européenne, le défi est pourtant de taille. Joueur en manque de confiance totale, le pari tactique peut être énorme et à double tranchant. La balle est désormais dans le camps de Havertz. 

Louis #AFC

 

 


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